Les robots arrivent.

Bonjour,
Je reprends vos mots :"Nous sommes impatients de recevoir vos feed-back, suggestions, ainsi que vos questions et nous nous réjouissons de dialoguer avec vous." Vous êtes assurément très bons en marketing. Qu'en est-il de votre éthique ? En parlant de "dialogue", par exemple :
Je me suis rendu aujourd'hui, comme depuis des années, dans un de vos restaurants à Lausanne. J'ai demandé un cheeseburger à un très sympathique employé à la caisse. Il a dû me le refuser; il m'a expliqué que je devais passer par une "borne de commande automatique". J'ai insisté en lui disant que je voulais juste un cheeseburger, pas une séance de pianotage pour un bête sandwich. Il m'a souri d'un air désolé et m'a dit "ce sont mes nouvelles directives pour pouvoir vous servir ce sandwich".
Je vois que les bornes sont toute-jolies-toute-neuves. Alors, contrarié mais un peu curieux, je m'approche d'une d'entre elles. Je connais très bien l'ancien modèle : lent et poussif, animations des menus en flash (pour ce que je peux en juger) qui rament, propositions suggestives pour me faire acheter plus que ce que je veux vraiment, nombre impressionnant de pressions sur l'écran tactile pour obtenir un simple menu sans rien d'autre, et j'en passe. Le nouveau modèle surprend : il ne rame plus. Une pression sur l'écran déclenche immédiatement une réponse trop longue mais très fluide… Mais c'est jusque là que les améliorations se font remarquer. Pour le reste, j'ai toujours l'impression d'être baladé dans vos menus abscons à la recherche d'un simple article. Si j'ai bon souvenir, le chemin à faire pour un cheeseburger est Toucher l'écran > Sur place > Classiques > Petits burgers > Cheeseburger > Terminer la commande > Non merci (à votre écran de "suggestions"… non, non, je-ne-veux-vrai-ment-qu'un-cheese-bur-geeeeeer, pitié, quoi !) > Passer la commande > Oui (je confirme) > prendre mon ticket pour finalement allez payer — à ce stade, j'ai presque l'impression de mériter que vous me payiez pour que j'accepte ce foutu sandwich.
Sérieusement, McDo ? Presque 2 minutes gâchées face à votre borne inerte et bête ? Alors qu'aux humains, on peut dire : "Bonjour, un cheeseburger, s'il vous plaît", payer avec un sourire et 2.50 et partir en moins de 30 secondes ? C'est le moment où, en humain instruit et sensible, on peut se demander, comme les personnes âgées qui aiment le dire bien fort : "Mais dans quel monde vit-on ?" Non, non, ne vous donnez pas la peine de chercher une réponse en me baratinant sur les vertus de cette nouvelle "révolution industrielle et numérique" qu'on est en train de subir; c'est une question rhétorique. Le monde dans lequel on vit est le suivant : un monde dans lequel vous allez pouvoir économiser sur les salaires en mettant moins d'employés aux caisses, dans lequel vous allez pouvoir vous taper sur l'épaule en vous félicitant de la rapidité de l'amortissement de vos appareils bornés, un monde dans lequel l'étudiant et le pauvre gars qui vient d'obtenir son permis de travail pourront aller bosser derrière, en cuisine et à la plonge —parce que les caissiers auront bientôt été remplacés par des crousilles et des lecteurs à cartes, des tapis roulants acheminant mon pauvre petit cheeseburger — avant que ces postes ne soient eux aussi revus et confiés à des automates. On peut déjà le faire, techniquement, mais c'est encore un peu cher, ça, non ? Mais ça viendra, en son temps, et ce sera super, n'est-ce pas ?
J'ai discuté avec votre gentil employé; il avait l'air d'en avoir besoin. Je me demande pourquoi. Il semblerait que le plan soit d'équiper progressivement tous vos restaurants de tels dispositifs.
Alors que faire ?
Premièrement, je vais vous demander votre point de vue sur le bienfondé de tout ce temps perdu pour une innovation bling bling à base d'écran tactile — aucune originalité — qui se fait au détriment de vos employés et de toute forme de lien humain, point de vue qui ne manquera pas de m'intéresser. Deuxièmement, histoire de ne pas être laissé sur le carreau avec cette histoire de révolution industrielle et numérique, je vais faire marcher les réseaux sociaux pour étaler mon petit désarroi du jour, histoire de vous faire un peu de pub — sans doute négative et donc indirectement positive, vous vous en sortirez sur le long terme. Je ne manquerai pas de faire suivre sur lesdits réseaux sociaux votre réponse, que j'anticipe bourrée de pirouettes commerçantes et rassurantes et faisant état de votre absence de volonté de réfléchir vraiment à quelque question que ce soit. Je pense à quelques uns de mes amis, qui se délectent particulièrement de ce genre de tentatives désespérées. Éclatez-vous ! Troisièmement, je vais favoriser les enseignes qui emploient encore des humains en quantité acceptable quand j'aurai une envie de burger. Il y en a plein à Lausanne, heureusement. En fait, toutes le font, sauf la vôtre. Quatrièmement, tant qu'à être tôt ou tard tous remplacés par des machines, je vais voter oui au RBI, et je vous laisse méditer sur ces trois cases pleines de bon sens : http://absurdo.lapin.org/index.php?number=53#strips
Bien à vous,

• Explications
• Autre Bonus : un retour à une gestion humaine de McDonald's